Le développement personnel et les approches psychologiques connaissent depuis quelques années un véritable engouement sur le marché de la formation professionnelle, dans la littérature managériale et plus largement dans le monde de l'entreprise. L'efficacité professionnelle s'évalue désormais à l'aune de la juste gestion de la relation à soi et à autrui. Il faut désormais " gérer ses émotions ", " être assertif " ou " développer son estime de soi " pour être performant. Comment expliquer le succès actuel de ces pratiques dans l'entreprise ? De quelles transformations sociales et managériales sont-elles les symptômes ?
En remettant en perspective la transformation des modèles de gestion et la demande sociale croissante de connaissance de soi depuis les années 1970, cet ouvrage montre comment le monde du travail a intégré les pratiques de développement personnel pour gérer l'individualisation du management. Elles s'inscrivent ainsi dans des stratégies managériales renouvelées, reposant sur l'exercice d'un pouvoir intériorisé, psychologique et moral.
La mode du « développement personnel » ne se dément pas. Sans cesse, nous subissons une injonction à nous libérer de nos croyances limitantes et à acquérir un « surplus d’être » pour devenir un meilleur individu. Bien sûr, on pourrait penser qu’il n’y a là que de bonnes intentions : qui refuserait une version améliorée de soi-même ? Mais derrière les discours sucrés et inoffensifs, c’est à la montée d’une idéologie politique que l’on assiste. Car la forme de bien-être promise par le développement personnel constitue trop souvent une exploitation de soi par soi… Dans ce monde merveilleux, tout tourne autour de cet axiome : quand on veut, on peut. Et si on ne peut pas, c’est qu’on ne veut pas assez. Le collectif disparaît de l’écran pour ne laisser que des individus responsables de tout à 100 % : de leur destin, de leur emploi, et même de leur santé ! C’est à cette vaste supercherie que s’en prend ici Thierry Jobard, preuves à l’appui...
L'Éthique à Nicomaque n'est pas seulement l'une des oeuvres les plus célèbres d'Aristote, l'une de celles qui témoignent le mieux aujourd'hui de sa philosophie. C'est aussi, plus généralement, un des grands textes de l'histoire de la pensée. Quelle est l'activité qui, en dernière instance, donne sens à la vie humaine ? Telle est l'interrogation qu'Aristote commence par soulever, sachant que l'être humain est un être rationnel, susceptible d'élaborer de multiples projets. On ne peut lire - ou relire - l'Éthique à Nicomaque sans éprouver combien la réponse à cette question entraîne le philosophe à la découverte de l'homme lui-même, en qui, selon Aristote, s'unissent mystérieusement la bête et le dieu. Cette nouvelle traduction dégage clairement la structure et l'articulation du texte d'Aristote. Elle s'accompagne d'un appareil de notes fourni qui tient compte des analyses et des interrogations principales dont le texte a récemment fait l'objet.
En 1656, après une existence mondaine où il cherche la gloire par l'exploitation de ses recherches scientifiques, Pascal entreprend une Apologie de la religion chrétienne que sa santé ne lui laissera pas le temps d'achever et dont nous restent seulement les fragments des Pensées. Le genre apologétique alors n'est pas nouveau. Mais Pascal écarte les démonstrations métaphysiques, inutiles et incertaines. Parce qu'il s'adresse au libertin, figure de l'incroyant, il ne parle pas d'emblée le langage de la foi que son interlocuteur ne recevrait pas : il ne part pas de Dieu pour aller à l'homme, mais de l'homme qui cherche le bonheur pour le tourner vers Dieu.
Le lecteur devient donc partenaire d'un dialogue : il s'aventure dans une démarche où tout son être est engagé et qui doit le conduire à se mettre en chemin vers un Dieu que ne chante plus l'harmonie brisée du cosmos, un Dieu plus que caché : un Dieu qui se cache. Et celui qui laisse les espaces infinis à leur effrayant silence est le même qui murmure à l'âme : « Console-toi, tu ne me chercherais pas si tu ne m'avais trouvé. »
Le renom d'Etienne de La Boétie, ami de Montaigne, s'attache à un écrit composé "à l'honneur de la liberté, contre les tyrans";. Comment expliquer qu'un peuple entier puisse ployer sous le joug d'un seul homme sans force ni prestige ? A cette question, l'auteur répond que la servitude est volontaire ; ce sont les peuples qui, en acceptant de se soumettre, contreviennent à ce qu'il y a de plus profond dans la nature humaine : la liberté. Pourtant, et c'est là tout le scandale dénoncé par l'auteur, rien de plus simple que s'affranchir du tyran. "Soyez résolus de ne servir plus, et vous voilà libres";, affirme-t-il. Interrogeant les ressorts secrets de la domination, La Boétie construit une oeuvre majeure pour l'histoire de la pensée politique.
Comment dire le mal-être au travail ? Que faire des émotions ressenties au travail, celles qu’on ne peut pas exprimer parce qu’on se révèlerait « trop sensible », ou pas suffisamment « performant » ni « professionnel » ? Comment dire la peur, celle qui est jugée « irrationnelle » ? Considérés comme des « ressources humaines », les travailleurs n’arrivent plus à donner du sens à ce qu’ils vivent.
Nourri d’une recherche socio-anthropologique, cet ouvrage présente une analyse du langage utilisé dans le management en articulant les registres de la pensée, de l’éprouvé et de l’action. Avec des illustrations saisissantes et des références théoriques diversifiées, l’auteur analyse les dévastations qu’occasionne le management moderne en toute tranquillité, en toute impunité :celui-ci ne provoque pas seulement du mal-être au travail. Par l’utilisation de sa novlangue, il participe aussi et surtout au corsetage des imaginaires, au façonnage des univers symboliques, au formatage des émotions, à l’écrasement des intelligences individuelles et collectives.
Agnès Vandevelde-Rougale ne se contente pas de démonter le processus d’intériorisation du discours dominant, elle souligne le potentiel de résistance de l’individu et les voies qui s’offrent à lui pour se dégager de ces entraves langagières et faire face à la violence plus ou moins ordinaire à l’œuvre dans les organisations.
Considéré comme l’un des penseurs les plus importants de ce début de siècle, David Graeber revient après cinq ans d’enquête pour analyser la notion de Bullshit job ou « Job à la con », née sous sa plume et qui a fait le tour du monde.
L’auteur du succès de librairie Dette : 5000 ans d’histoire, postule ici que la société moderne repose sur l'aliénation de la vaste majorité des travailleurs de bureau qui sont amenés à dédier leur vie à des tâches inutiles et sans réel intérêt, tout en ayant pleinement conscience de la superficialité de leur contribution à la société.
En effet, alors que le progrès technologique a toujours été vu comme l’horizon d’une libération du travail, ce phénomène désignant des emplois vides de sens, inutiles ou superficiels concerne un nombre de plus en plus important de travailleurs…
Depuis l'époque de Descartes, un nouveau personnage occupe la scène philosophique : le moi, tandis que s'éclipsent d'autres personnages qui eurent leurs heures de gloire - tels l'intellect agent et l'âme. D'où sort-il ? Par une intéressante alchimie, les philosophes ont tiré de notre usage ordinaire d'un pronom ("moi") un être philosophal pur ("le moi"). Au terme de quelles aventures conceptuelles le moi se trouve-t-il à la fois à la troisième personne (pour qu'on puisse dire "le moi") et à la première (puisque toute l'idée est d'expliquer ce qui fait que je suis moi) ? Tire-t-on le sens des mots "toi", "lui", "elle" de notre usage du mot "moi" ? Loin que l'on puisse dériver la diversité des personnes d'un rapport à soi dont le pronom "je" serait le seul instrument, c'est au contraire la première personne qui tire son sens et ses traits originaux de sa position au sein du système personnel. Autant de questions grâce auxquelles Vincent Descombes, avec cet air de rien qui est sa marque de fabrique, montre nos incohérences philosophiques et égotistes !
Wittgenstein a souligné à maintes reprises que la distinction intérieure-extérieur ne l’intéressait pas, et précisé que c’était une manière de dire que la philosophie n’a rien à voir avec la psychologie. Mais, en caractérisant la philosophie comme une recherche conceptuelle ou “ grammaticale ”, il a, de façon plus générale, rejeté comme non pertinentes pour ce dont il est question dans le travail du philosophe toutes les philosophies de la conscience et du sujet. Même les concepts qui décrivent ou donnent l’impression de décrire des expériences internes privées comme ceux de “ douleur ”, “ vision ”, “ sensation ”, “ pensée ”, “ compréhension ”, etc., doivent être caractérisés avant tout par la manière dont ils entrent dans des jeux de langage publics que nous jouons les uns avec les autres. Les jeux de langage – qui prennent en un certain sens la place du transcendantal – constituent le “ phénomène premier ”, ce qui est toujours déjà là et doit être accepté. Vouloir remonter au-delà, comme le font à la fois les philosophies du fondement et celles de la déconstruction radicale, c’est ne pas vouloir “ commencer au commencement ” et caresser finalement le rêve (qui n’est pas propre aux empiristes) de “ ce son inarticulé par lequel certains auteurs aimeraient bien commencer la philosophie ”.
Peut-on réellement croire que la Terre est plate, qu'une lutte secrète contre une vaste cabale pédo-sataniste des élites de l'État profond était au coeur de la présidence Trump, ou que le vaccin contre le Covid-19 est un outil de contrôle de la population ? « Fake news », complotisme, rejet de l'expertise scientifique, extrême polarisation du débat public, crispations identitaires : notre époque semble être victime d'une véritable épidémie de croyances irrationnelles. À rebours de cette analyse, ce livre propose d'explorer une hypothèse provocante : une grande part de ce que nous appelons des croyances ne sont en réalité pas des croyances du tout ; ce sont des croivances, autrement dit des pseudo-croyances, qui, indifférentes à la vérité, n'en n'affectent pas moins profondément notre vie intellectuelle et politique. À l'interface de la psychologie et de la philosophie, Croiver offre une plongée sans concession dans l'univers complexe des croyances et du complotisme contemporain.
Jacques Chancel s'entretient avec Jacques Brel à l'occasion de la présentation de son second film ""Far West"" au festival de Cannes. Il parle revient sur ses carrières de chanteur, cinéaste et sur sa philosophie de vie.